La place du péché originel dans notre dépouillement ?

Question :
Dans l'intro de ce que tu appelles "complément", tu parles du mystère de l'Incarnation puis tu dis :

"Ce chemin de dépouillement n'a pas le péché originel ou même actuel comme cause première. La cause en est plus profonde." [citation]

Pourtant si Dieu a envoyé son Fils sur la terre, c'est pour nous sauver du péché. S'il n'y avait pas eu le péché originel, Jésus n'aurait pas eu besoin de souffrir sa Passion, et nous n'aurions pas eu besoin de faire tout ce chemin de dépouillement ?

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Réponse :

Ce n'est pas tout à fait exact.
Il faut différencier les deux choses suivantes :

- Jésus est venu sur la terre, parmi les hommes, en s'incarnant, envoyé par son Père, pour nous sauver du péché. La cause donc de ce salut de Jésus pour les hommes est bien le péché originel, incluant ainsi tout le péché des hommes, et le nôtre. Jésus est donc bien venu pour cette raison, et s'est anéanti sur la croix pour nous sauver de ce péché.

- Cependant, le dépouillement qui s'opère en Jésus ou en nous-mêmes n'a pas pour cause le péché. Que Dieu ait créé l'homme ou non, il était déjà trinitaire, et déja mort à Lui-même (Le Pere dans le Fils et le Fils dans le Père) (anéantit) entièrement par Amour. La cause de notre dépouillement, et en toute logique, la constatation (et la certitude !) que Jésus lui-même est totalement dépouillé sur la croix est donc due à une seule chose : l'ESSENCE MEME DE DIEU, qui est mort à Lui-même, et que L'on veut rejoindre, car Il nous le propose. On dépasse donc le simple salut face au péché, ou plutôt on l'accomplit pleinement, en acceptant et poursuivant totalement ce dépouillement de nous-même pour accéder à Dieu et devenir semblable à Lui.

La Passion et la mort de Jésus sur la croix nous montre donc ces deux choses : notre péché (et par ce biais son sacrifice pour nous en sortir), et de quelle nature est notre Dieu, car ce sacrifice est entièrement par Amour, et est "mort" de Dieu à lui-même. Mais Dieu est déjà entièrement mort à lui-même alors qu'Adam et Ève n'ont pas péché.

Comments

[Xavier]

Bonjour,

J'ai un peu de mal à vous suivre lorsque vous dites que Dieu est mort à Lui-même.

Que de la crucifixion, on puisse dégager que Dieu est effusion d'amour pur (à l'image de l'effusion du sang du Christ pour nous sauver) j'en conviens assez facilement, mais Dieu mort à Lui-même ?

Pourriez-vous développer s'il-vous-plaît ?

Cordialement,

[serviteur du Seigneur]

Je vais essayer de développer comme vous le demandez, autant que je le puis, l'idée selon laquelle Dieu est "mort à lui-même". Peut-être qu'il convient d'abord de définir ce qu'on appelle "mourir à soi-même". En effet; il s'agit de saisir que cette expression ne consiste pas en une négation de soi. Il s'agit de manière plus exacte d'un oubli de soi par Amour. Il s'agit en fait de faire de mon amour (pour Dieu, pour l'autre) un don de moi-même à l'autre, au point de mettre en premier lieu l'autre, avant moi-même. Dans notre cas, il s'agit de faire que la Volonté de Dieu prime sur ma propre volonté. Dans le cas de Dieu, c'est un peu différent. Il est sans doute plus difficile de voir en quoi Dieu est "mort à lui-même" tant que nous-mêmes ne sommes pas entièrement passés par cette mort.Vous regardez à juste titre la crucifixion qui est scandaleuse car elle crucifie Dieu sur la croix, et celui-ci se laisse faire par amour pour l'homme. Jésus, qui est Dieu, nous révèle cette effusion d'amour, dont vous parlez, qui est grandiose, sensationnelle, où par son sang, Dieu nous rachète de nos fautes, et nous révèle la Vérité. Cependant il n'est pas toujours évident de voir le côté "utile" de la Passion, ce qui dans la Passion nous sauve, et le "côté" "essentiel" de la Passion, à savoir la dimension de ce sacrifice qui nous révèle qui est Dieu. Comme vous dites, nous voyons que la Passion nous sauve et ceci est "l'utilité" de ce sacrifice si scandaleux (bien que je n'aime pas parler en terme d'utilité, mais cela est juste il me semble). Mais dans la Passion, il peut y avoir une dimension "essentielle", une dimension qui révèle qui est Dieu dans son essence même. Ainsi, vous en déduisez avec moi : Dieu est AMour, et cette effusion dont vous parlez en est pour nous la meilleure preuve. Dieu n'a pas été Amour le temps de la Passion, Il l'est et le sera toujours, l'Amour fait partie de son essence même. Aussi je vous invite à contempler maintenant l'agonie de Jésus au mont des Oliviers. Ce passage peut être un peu surprenant car rien encore n'est arrivé, physiquement, et nous parlons déjà de l'AGONIE de Jésus. Je crois qu'il s'agit véritablement d'une agonie, qui est une souffrance dans l'ame et le corps (car jaillissent des sueurs de sang). Cette agonie, contrairement à la crucifixion, n'est pas au premier abord abord "utile" (bien que toute souffrance offerte, surtout du Christ, soit utile). Par contre elle rélève ce que justement vous me demandez de développer. Elle révèle que Dieu est mort à lui-même. la phrase essentielle prononcée par le Christ en ce moment est celle-ci : "Seigneur, que cette coupe s'éloigne de moi. cependant, non pas ma volonté, mais ta volonté". Cette phrase est le coeur de ce que j'appelle la mort de Dieu à lui-même.Qui oserait prétendre que Jésus voulait mourir sur la croix, surtout après le phrase que je viens de citer. Qui encore oserait prétendre que Dieu voulait la mort de son Fils sur la croix, surtout de cette manière. C'est une évidence, il n'est pas plaisant à Dieu de sacrifier son Fils. Il le fait non par plaisir, mais bien par Amour. Il est d'une certaine manière "soumis" à son Amour incommensurable au point qu'Il se sacrifie lui-même (Dieu en tant que Trinité, et non uniquement le Christ) par Amour pour sa créature. Cette offrande admirable de ce sacrifice, c'est donc un sacrifice du Fils, c'est évident, mais tout autant un sacrifice du Père. Un sacrifice de Dieu dans ses trois personnes car l'Amour est ce qu'EST Dieu. Ainsi, que Jésus soit mort ou non à l'issue de sa passion n'y change rien : s'Il ne l'avait pas fait, Il en eu été autant capable. C'est ce en quoi je dis que c'est son essence même qui fait que Dieu est "mort à lui-même". Je préfère m'arrêter là, et je suis prêt à entendre vos réponses et interrogations si vous en avez, et ce que vous en pensez bien entendu.Encore toutes mes excuses (c'est une honte !) d'avoir tant trainé à vous répondre. Dieu vous bénisse !+ serviteur du Seigneur +